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AS YOU LIKE IT de Shakespeare

peint sous le vernis de la pastorale, un monde où deux systèmes de valeurs s’opposent.

Un nouveau pouvoir, fondé sur une autorité et une violence arbitraire, chasse l’ancien régime lié par un respect de la féodalité.

La tyrannie combat le chevaleresque. Le chevalier est contraint à l’exil.

Les héros d’As you like it s’échappent ainsi d’une société où ils n’ont plus leur place. Une fuite en avant qui les conduit en Forêt d’Arden(nes).

 

La forêt se pose comme hors du monde séculier. En marge des codes socio-politiques, elle est synonyme d’une transgression des possibles. Loin des contraintes et de la soumission, elle est lieu de refuge.

Or ce choix s’accompagne d’une mise à l’épreuve des corps. La menace de l’hiver et de la faim confronte les personnages à une vie rude.

Affranchis et démunis, ils tiennent l’occasion, en cette place, de construire autrement. L’hostile se transforme en climat de régénération. Un frisson de vie qui les engage à un retour vers des valeurs fondamentales. Ou comment trouver en l’homme la solution pour ériger, au milieu du précaire, du pérenne . L’alternative se transforme en révolution.

 

La forêt exclut tout passé et tout futur. Son temps est le présent. Elle règle à la même heure et au même rythme les horloges de chacun. Le temps de la nature devient celui favorable à l’échange. Il permet la rencontre, l’apprivoisement, et un cheminement commun. Ce lieu désert devient prolifique par l’autre. La forêt d’Ardennes incarne une forêt d’humanités.

 

La pastorale, d’abord prétexte, se révèle un terrain d’initiation. Rosalind, travestie en Ganymède, éprouve l’amour d’Orlando; tout en rougissant, sous le masque, du sentiment qu’elle sent poindre. Le jeu de l’un rebondit sur celui de l’autre. D’interrogations en épreuves, ils marchent vers un apprentissage.

La narration avance par la mécanique de l’expérience.

 

La sommes des expériences de la pièce traverse la question du désir. Elle dessine un parcours vers une mise en accord avec cet horizon. C’est une quête: se sentir juste et à sa juste place. Et répondre enfin à l’injonction donnée par le titre: as you like it . « Comme il te plaira », « comme tu l’aimera » ou « comme tu le souhaitera » appellent à un positionnement. Les personnages cherchent à réconcilier aspiration et réel, pour formuler un désir en pleine conscience et rénover le monde.

As You Like It nous fait sentir le monde. Pour pouvoir saisir un état du monde, et être à même de le questionner, il faut être plongé dans les points de vue de tous ses acteurs, il faut être pris au jeu commun de la représentation, et il faut s’ouvrir à l’expérience. Chez Shakespeare, le spectateur passif n’existe pas, en assistant à la pièce, nous y participons. 

    

Dans notre quotidien insondable il y a une forme d’urgence, à se poser « hors » du réel, un temps, pour tenter de le comprendre plus clairement. Etre en dehors pour être à nouveau, ouvrir les portes et provoquer les rencontres. S’atteler à la création collective, autour d’un matériau vivant, sans se poser de limites. 

« Qui sous le vert feuillage,

Près de moi dans l’ombrage,

Veut chanter son air de fête

D’une voix d’alouette,

Qu’il vienne, qu’il vienne, qu’il vienne :

Il n’a ici

Nul ennemi

Que l’hiver et les glaces prochaines. »

    As You Like It, Acte II, Scène 5

 « Le monde est un théâtre, tout entier, et,

tous ne sont que des acteurs,

hommes et femmes:

tous, ils ont leurs sorties et leurs entrées, … »

        

As You Like It Acte II, Scène 7

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